La guerre des civils, soutenir le conflit.

Si Strasbourg est une place forte, c'est avant tout une ville de 178 000 habitants qui, à l'instar du reste de l'Allemagne sous blocus des alliés, doit soutenir l'effort de guerre tout assurant la subsistence de sa population fragilisée par les départs des soutiens de famille au front. L'administration municipale, qui dispose de service sociaux modèles pour l'époque, est en première ligne durant les quatre années de guerre en relevant des défis sans précédent.

Rudolf Schwander, 1868-1950

L’administration municipale en guerre

L’administration municipale est également prise au dépourvu par la mobilisation. La Ville est dirigée depuis 1906 par le maire Rudolf Schwander. Ce dernier avait mis en place des services sociaux modèles qui jouent un rôle important durant les années de guerre.

Dès le 31 juillet 1914, la municipalité se voit subordonnée à l’autorité du gouverneur militaire qui a les pleins pouvoirs sur la place. L’armée projette d’évacuer la population pour éviter, en cas de siège, un scénario identique à 1870. Mais le maire s’y oppose farouchement et, avec l’aide de son secrétaire général Anton Zimmer, parvient à convaincre l’armée de renoncer à ce projet en faisant entrer à Strasbourg plusieurs trains remplis de nourriture.

Pour gérer cette situation d’exception, la municipalité met en place des commissions spécifiques (marchés, emploi, ravitaillement) ainsi que des services de temps de guerre. L’administration se réorganise complètement pour pallier la mobilisation de ses agents et assurer ses missions nouvelles. Elle recrute des jeunes, des invalides de guerre et des femmes. En septembre 1915, 260 femmes sont embauchées comme conductrices ou receveuses de tramway. Le nombre d’employés monte en flèche : on passe de 686 employés et 848 ouvriers (dont 30 femmes) en 1914 à 1364 employés (dont 621 pour les services de guerre) et 1006 ouvriers en 1918.

La ville doit remplacer ses personnels, mais elle doit aussi trouver de nouveaux locaux pour remplacer ceux, comme les écoles, réquisitionnés pour les besoins de l'armée.  Elle doit ainsi louer de nombreux locaux. Les dépenses sociales doublent.

La guerre entraine pour la ville une diminution des recettes et une forte augmentation des dépenses exceptionnelles : les charges augmentent de 1000 % et la dette s’accroît de 4,3 millions de marks. Malgré les avances de l’État, la municipalité est obligée d’emprunter les sommes qui lui font défaut. Elle finit par émettre une monnaie de nécessité - Notgeld - en 1918, mais qui sera peu utilisée.

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Propagande et soutien à l’armée

Lors du déclenchement du conflit, chaque camp espérait une guerre courte. Mais le passage de la guerre de mouvement à la guerre de position, fin 1914, anéantit la perspective d’une victoire rapide. Aux élans patriotiques de la mobilisation font place la résignation et la lassitude d’une population qui s’enlise, année après année, dans un quotidien où la guerre est omniprésente.

Les autorités craignent que le « défaitisme » ne s’installe dans les esprits et finisse par conduire à un  relâchement de l’effort de guerre. Ils n’ont donc de cesse de promettre aux populations une victoire certaine et proche. Cette certitude est justifiée par la légitimité de la cause défendue par l’Allemagne et ses alliés. La propagande allemande rejette ainsi la faute des épreuves sur l’ennemi et présente son propre camp comme celui de la justice et de la paix. On se félicite des victoires et les textes incitent à travailler pour soutenir l’armée. Les offices publics, les visites protocolaires, les conférences, les tracts, les affiches participent de cette politique.

Toute l’activité économique est réorientée pour fournir armements, munitions et équipements au front. De nombreux ateliers de confection ouvrent pour répondre aux importants besoins des troupes en vêtements. L’industrie imagine des produits spécifiques adaptés à la vie dans les tranchées: ambulances, vêtements, armes, ou bien assure des livraisons spécifiques en pain, viande ou légumes.

La propagande encourage les familles restées à l’arrière à aider leurs proches partis au combat, mais aussi les indigents et les soldats blessés rentrés du front. Les colis forment la base de ce soutien. La Ville organise des envois, notamment pour Noël, au profit des soldats strasbourgeois. On y trouve des réchauds, du chocolat, des cartes à jouer, du tabac…

 

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Financer la guerre

Cette guerre de l’ère industrielle mobilise quantité d’hommes et de matériels. Pour financer ce conflit d’une ampleur inconnue jusque-là, les États doivent réunir des sommes colossales. Ils ont cependant déjà englouti des sommes considérables durant les premiers mois de la guerre et doivent donc emprunter auprès des populations les capitaux nécessaires à la poursuite des opérations.

A cette fin, l’Allemagne lance neuf emprunts de guerre à partir de septembre 1914. Ces emprunts d’État se répètent tous les six mois, en mars et en septembre, le dernier étant lancé en septembre 1918. Ces emprunts permettent de récolter 98 milliards de Reichsmark, ce qui représente 60 % des dépenses de guerre de l’Empire.

Des mesures administratives sont prises afin de favoriser la souscription des emprunts de guerre : fermeture de la bourse, interdiction d’émettre des obligations dans d’autres buts, obligation des banques de souscrire à l’emprunt.

D’autres opérations de collecte mobilisent les économies des habitants. Toute une propagande est imaginée pour informer la population et susciter les dons.

On distribue des objets-souvenir : bagues, médailles, ersatz en fer pour remplacer l’or ou les objets en métaux non ferreux (cuivre, laiton, aluminium) collectés. Des statues de bois représentant des symboles patriotiques sont couvertes de clous, chaque clou correspondant à un don.

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