La vie des Neudorfois

La population du Neudorf est en mutation constante, d'abord essentielement constitué de maraîchers la population s'est densifié et diversifié avec l'urbanisation progressive du quartier. Ces dernières années un processus de gentrification a profondement transformé ce quartier populaire.

Se loger au Neudorf

Au XIXe siècle, l’idée de logement social apparaît en France, l’Etat commence à légiférer et à promouvoir l’aide financière pour la construction d’habitations à bon marché (HBM) qui prennent souvent la forme de cités. Il s’agit de favoriser un habitat plus salubre, de freiner la spéculation immobilière et de donner des priorités d’attribution de logements aux personnes les plus nécessiteuses.

C’est à partir de 1921 que la législation française sur les HBM est étendue aux 3 départements réintégrés à la France après la Première Guerre mondiale.

Sur l’initiative du maire socialiste Jacques Peirotes, Strasbourg se dote d’un Office Public d’Habitations à Bon Marché le 21 janvier 1923 et met en place une véritable politique du logement.

La population ayant fortement augmenté au Neudorf dans les décennies précédentes, le quartier se trouve confronté à une pénurie de logements.

Pour résoudre ce problème, sont réalisées 3 grandes opérations entre 1926 et 1932 (1400 logements au total) :

  • La cité HBM Jules Siegfried (1926-1928),
  • La cité Georges Rissler (1931-1933),
  • Le groupe rue de Bâle (1932-34).
 

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Du jardin à l'usine

Dès avant le XVIe siècle, le secteur du Neudorf connaît une activité pré-industrielle. L’omniprésence de l’eau associée à un terrain argileux est propice à l’établissement des tuileries-briqueteries appartenant ou contrôlées par la ville, mais aussi à l’implantation de moulins et de corderies. En 1745, Paul Antoine Hannong demande la concession d’un emplacement pour y construire un moulin destiné à moudre les matériaux pour sa faïencerie : le Porzellanmühl est né. Il sera ensuite converti en moulin à tabac et à blé.

Au XIXe siècle, les entreprises industrielles quittent progressivement le centre ville pour s’installer dans dans les faubourgs, qui commencent à se peupler comme le montrent les pétitions des riverains qui se plaignent de ces nouvelles nuisances.Les usines à nuisance olfactive se multiplient au Neudorf : une fabrique de colle forte à la Musau dans les années 1840, une fabrique de suif en 1855, de gélatine en 1852, une fabrique de savon phosphoré, etc..Les entreprises industrielles sont diverses dans la première moitié du XIXe siècle.La vinaigrerie Saas ouvre en 1863 rue du Lazaret. Le textile se maintient avec la présence d’une fabrique de toile cirée route du Polygone, une amidonnerie rue du Lazaret, une fabrique de cartons et papiers d’emballage en 1851. Une fabrique de goudron route du Polygone, ouverte en 1852 et appartenant au sieur Nicot, utilise un moulin à vapeur.Mais le véritable décollage industriel du Neudorf s’effectue au cours de l’annexion à l’Empire allemand (1871-1918).

Neuhof est surtout célèbre pour ses fabriques de pâtes. En 1872, Jundt et Ziegele fondent la société « la Cigogne » au fossé Riepberg. L’usine se fournissait en blé en Russie jusqu’en 1914-1918, puis en Algérie via Marseille. Sont également crées les entreprises Crailsheimer en 1899 ou  la fabrique Deka.

Nous pouvons encore citer les établissements Maurel qui fabriquent à partir de 1872, route de Colmar, des vêtements professionnels, l’entreprise de transports internationaux Heppner installée sur la même route en 1912, la société Joustra crée en 1934 par Paul et André Kosmann qui s’installe rue de Belfort, etc.

Tous ces établissements industriels, souvent familiaux, disparaissent dans les années 1960 ou quittent le quartier en raison de l’évolution économique et de la pression foncière.

 

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Se divertir

Les cabarets et auberges étaient au XIXe et dans la première moitié du XXe siècle, le principal lieu de sociabilité populaire. Plus de que des lieux à boire, ils furent longtemps des lieux de loisirs et de rencontres: spectacles, bals, lecture de journaux, discussions politiques…..

Les cabarets s’installent au Neudorf au XVIIIe siècle, le long des principales voies, en suivant le peuplement du quartier : route du Polygone, de Colmar, du Rhin. Ils connaissent tous un grand essor au XIXe siècle avec le développement des jardins, c’est-à-dire des ginguettes et des bals, au point que Neudorf devient le haut lieu des bals et des promenades strasbourgeoises au cours de la seconde moitié du XIXe siècle.

En 1902, on dénombre 80 estaminets avec restaurants et salles de bal.

La clientèle est populaire composée d’ouvriers, de domestiques, de militaires et de prostituées, même si certains établissements cherchent à embourgeoiser leur clientèle.

Tous ces établissements disparaissent lentement à partir de l’entre-deux-guerres.

L’usage de se baigner dans les rivières est attestée dès le XVIe siècle. Au XIXe siècle, la municipalité réglemente les bains qui relèvent à la fois de l’hygiène, de la morale et du loisir.

Au Neudorf, des bains de plein air  sont ouverts :

-En 1893, au Ziegelwasser-Polygone, près du moulin à porcelaine,

-En 1894, au Rheinfeldergiessen-Bruckhof. Fermé en 1927, il est remplacé par le bain de la Musau dans le Ziegelwasser photographié ici en 1930.

A la Musau, un bassin spécial pour les enfants est installé en 1930 et le bain pour les femmes est agrandi en 1932. L’aménagement de ces bains en plein air était assez sommaire.

Le 1er avril 1930 est inauguré, au 42 rue du Neufeld, un établissement d’hygiène proposant des cabines de douche et de bain pour palier l’absence des salles de bain dans les logements des Neudorfois.

Le développement du Neudorf est contemporain de l’émergence d’un nouveau loisir très populaire : le cinématographe. La première séance de cinématographe au centre ville de Strasbourg a lieu en juin 1896. Le quartier dispose de son premier Kinematographen Theater dans le débit de boisson le Reichshallen route de Colmar en 1910. Avec sa population importante et sa forte concentration de débits d’alcool et de salles de cabaret, le quartier réunit toutes les conditions pour accueillir de nombreuses salles de cinéma. Trois cinémas se succèdent entre 1910 et 1960 dont le plus célèbre est le Scala construit en 1938 route du Polygone.

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Porteurs de bière au cimetière Saint-Urbain. Dessin de Théophile Schuler, paru dans Arnold, Der Pfin

Les équipements publics

Le quartier en plein essor nécessite la construction d'équipements publics, qu'il s'agisse d'écoles pour les nombreux enfants ou des lieux de cultes.

Plusieurs écoles sont ainsi construites au Neudorf après 1871 :

  • L’école de la Ziegelau est achevée en 1878, elle est fortement touchée par le bombardement de 1943, reconstruite après la guerre elle est inaugurée en 1957.
  • L’école du Schluthfeld, construite sur les plans de l’architecte de la ville Johann-Carl Ott, ouvre en 1899.
  • L’école de la Musau, également construite sur les plans de Johann-Carl Ott, ouvre en 1897. A partir de 1906, seules les filles restent dans ce bâtiment, les garçons vont dans un nouvel édifice construit par l’architecte Beblo (actuel collège Louise Weiss).
  • À partir de 1907 fonctionne l’école du Neufeld.
  • En janvier 1939, est inaugurée l’école du Rhin située à l’est du quartier.
  • Enfin en 1957, est construit le lycée du Neudorf, aujourd'hui lycée Jean Monnet.


Au XIXe siècle, les églises assurent une fonction religieuse mais aussi sociale avec les clubs et associations qui s’y rattachent: gymnastique, scoutisme, ouvroir, œuvres charitables…

4 paroisses existent au Neudorf, les églises sont toutes construites aux XIXe et XXe siècles.

Pour les catholiques:

  • Saint-Aloïse : la paroisse est créée sous le Second Empire, l’église est construite de 1886 à 1887 sur les plans de l’architecte de la ville Jean-Geoffroy Conrath,
  • Saint-Urbain, 1905,
  • Saint-Léon créée en 1924, l’église est construite l’année suivante.

La paroisse protestante est créée en 1878, l’église est construite en 1884-85.

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Circuler

En 1861, la Société des chemins de fer d’Alsace et de Lorraine construit une ligne de chemin de fer reliant Strasbourg à Kehl. Elle passait par le pont du canal du Rhône au Rhin, suivait l’actuelle avenue Jean Jaurès, pour faire ensuite une large courbe en direction du pont du Rhin.

En 1906, le tracé de la ligne est modifié. La nouvelle ligne de chemin de fer Strasbourg-Kehl, est construite sur un remblai de 7 mètres de hauteur environ au sud du quartier, elle contribue à l’expansion du faubourg, mais referme le quartier sur lui-même.

Le faubourg disposait d’une gare de voyageurs construite en 1860-61 près du Heiritz. Celle-ci est détruite en 1985.

Le 22 juillet 1878, Strasbourg inaugure sa première ligne de tramway hippomobile. Elle partait de la place de Pierres, traversait la ville jusqu’à la porte d’Austerlitz, d’où elle rejoignait le pont de Kehl en passant par la route du Rhin. La ligne est électrifiée sur l’axe Place Kléber-Neudorf à partir de 1885.

Boudé dans un premier temps par les Strasbourgeois en raison des retards trop fréquents et d’horaires peu adaptés, le tramway devient par la suite très utilisé par les ouvriers rejoignant les industries installées le long de la route du Rhin, dans la plaine des Bouchers et la zone portuaire. Trois lignes traversent ce quartier populaire en pleine expansion.

A la fin des années 50, ce mode de transport vieillissant et insuffisant disparaît au profit de l’autobus, pour faire sa réapparition en 1997 au Schlutfeld et en 2007 avenue Jean Jaurès.

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