Une guerre de propagandes

Le travail aux champs et à l'usine
Dans une guerre totale comme la Première Guerre mondiale, la propagande s'intéresse à tous les thèmes pour soutenir l'effort de guerre et entretenir le moral de l'arrière.
 
Elle s'adresse tant aux populations urbaines qu'aux campagnes, le travail est érigé en vertu patriotique tout comme l'endurance face aux privations. La propagande tente de lutter contre le défaitisme en minimisant la dégradation de la situation des empires centraux, tout en garantissant une issu victorieuse à une population qui y croit de moins en moins.
 
Pour autant, les affichistes ne sont pas déconnectés de la réalité de la guerre dont ils représentent l'évolution technique. L'Alsace, but de guerre symbolique, occupe une place de choix surtout dans les affiches françaises.

Le soutien moral

L'entrée en guerre est marquée par un important mouvement patriotique d'union nationale jusque dans la classe politique. En France, c'est l'Union sacrée, en Allemagne le Burgfrieden.

Mais, dans la poursuite de la guerre, les gouvernements doivent s'assurer que l'opinion publique y reste favorable. Il leur faut veiller aussi bien au moral des soldats au front qu'à celui de la population civile restée à l'arrière. Un argument est mis en avant : c’est le camp adversaire qui a rendu la guerre inévitable. Le bellicisme de l’autre est opposé à des protestations de justice et de paix.

En France, on emploie l'expression "guerre du droit" pour souligner le fait que c'est l'Allemagne qui a agressé une France obligée de se défendre. Les affiches dénoncent alors l'inculture, l'hypocrisie voire la barbarie de l'ennemi.

Tout au long du conflit, il faut entretenir auprès de la population la certitude de la victoire et combattre le défaitisme afin d’éviter un relâchement de l'effort de guerre. Les affiches sont alors utilisées pour démontrer l'affaiblissement de l'ennemi, ce qui confirme l'imminence de la victoire.

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L'évolution de l'armement

Les affiches constituent, d’une certaine manière, un indicateur imagé de l’évolution de l’armement. Elles permettent de voir apparaître les casques d’acier, les avions, les sous-marins et les chars.

Le casque à pointe subsiste comme symbole durable de l’armée allemande « éternelle » mais dans la réalité, il a été remplacé, en février 1916 par le Stahlhelm (casque d’acier, dit aussi casque à boulons).

Hitler devait écrire dans Mein Kampf : „aus  dem Schleier der Vergangenheit heraus [wird] die eiserne Front des grauen Stahlhelms sichtbar werden, nicht wankend und nicht weichend, ein Mahnmal der Unsterblichkeit." Le Stahlhelm devint même le nom d’un mouvement militaro-politique qui, aux yeux des révolutionnaires des débuts de Weimar, apparut comme le symbole des forces d’ordre réactionnaires. Ultérieurement, au début des années 1930, ce mouvement fit équipe avec le parti nazi. Le peintre Erler qui fit la célèbre affiche « Helft uns siegen! » fut apprécié par les nazis. Il fut notamment appelé à faire un portrait de Hitler et ceux d’autres dignitaires.

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Le thème de l'Alsace-Lorraine dans les deux camps

Après la défaite française contre la Prusse en 1870, l'Alsace et une partie de la Lorraine sont annexées par l'empire allemand. Cette annexion est à l'origine d'un fort sentiment de revanche en France, sentiment qui contribue au déclenchement de la première guerre mondiale. Si le thème de l'Alsace-Lorraine, provinces perdues, reste récurrent dans le débat politique français jusqu'en 1914, il a cependant perdu, aux fils des décennies, beaucoup de son retentissement dans l'opinion publique.

Mais face aux milliers de morts, la défense de la Serbie et de la Belgique ne constitue plus une justification suffisante pour faire accepter à la population française la poursuite de la guerre. Dans ce contexte, la reconquête de l'Alsace-Lorraine redevient le thème majeur de la propagande française et son principal but de guerre. De nombreuses affiches françaises représentent ainsi Alsaciennes et Lorraines attendant le retour de la France.

En réaction, l'Allemagne insiste sur l'appartenance historique de l'Alsace-Lorraine à l'aire germanique et affirme sa volonté de défendre l'intégrité de son territoire national.

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Strasbourg en 1918

Après l'échec des offensives allemandes du printemps et de l'été 1918, l'opinion publique allemande, lassée par la guerre et les pénuries, se résout à la défaite. Le 3 novembre, les marins de Kiel se mutinent et l’empereur Guillaume II finit par abdiquer le 9 novembre. Les sociaux-démocrates prennent le pouvoir à Berlin, proclament la république et signent un armistice avec les alliés le 11 novembre dans la forêt de Compiègne.

A Strasbourg, comme dans le reste de l'Allemagne, soldats et ouvriers se constituent en soviet à partir du 9 novembre, à l’exemple de ce qui s’était passé en Russie en 1917. La république est proclamée le 10 novembre, place Kléber. Dans un climat révolutionnaire, le socialiste Jacques Peirotes est élu maire. Les troupes françaises entrent dans la ville le 22 novembre. Quatre années de privations et de restrictions ont réduit à néant les acquis politiques de 47 années d'annexion allemande. C'est donc une population enthousiaste qui accueille les troupes françaises. Mais le 29 novembre, la municipalité présidée par Peirotes est dissoute par les autorités françaises et remplacée par une commission municipale présidée par Léon Ungemach. C'est cette dernière qui accueille, le 9 décembre, le président de la République Raymond Poincaré et le président du conseil Georges Clemenceau.

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L'après-guerre

La signature du traité de Versailles, le 28 juin 1919, entérine le retour de l'Alsace-Lorraine à la France. Bien que le principal but de guerre français, à savoir la reconquête des provinces perdues en 1871, a été atteint, les affiches d'après-guerre continuent à exploiter le thème de l'Alsace-Lorraine. Mais à présent, cette propagande s'adresse aux populations des trois départements recouvrés du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Après 47 années d'annexion par l'empire allemand et malgré la liesse déployée lors de l'entrée des troupes françaises dans la région, les autorités françaises sont conscientes qu'il faudra du temps pour assimiler des populations qui n'ont qu'une représentation lointaine de la France.  

Pour leur part, les autorités locales affichent leur patriotisme en organisant notamment des quêtes et autres œuvres de charité en faveur de communes françaises touchées par les combats.

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