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Le comte de CAGLIOSTRO à Strasbourg

AA 2110

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Le personnage

Giuseppe BALSAMO, dit comte de Cagliostro, est né à Palerme le 2 juin 1743 et décède dans la prison pontificale de San Leo en Italie, le 26 août 1795, condamné à mort comme  franc-maçon par le tribunal de l’Inquisition, peine qui fut commuée en prison à perpétuité.

Le personnage est un aventurier italien, de modeste extraction, qui a sillonné l’Europe à la fin du 18e siècle, se présentant comme alchimiste et guérisseur. Il a été rendu célèbre par l’affaire dite du « collier de la reine » (1785) et surtout par les romans d’Alexandre DUMAS : Joseph BALSAMO (1853) et Le collier de la reine (1849-1850).

Son séjour à Strasbourg (1780-1783)

BALSAMO arrive à Strasbourg au début de l’automne 1780 sous le pseudonyme de comte Alexandre de CAGLIOSTRO, et se pose en guérisseur miraculeux. Il descend avec son épouse SERAFINA à l’hôtel de l’Esprit, quai Saint-Thomas, avant d’emménager dans la paroisse de Saint-Pierre le Vieux.

Très vite, il entre en contact avec le prince-cardinal Louis de ROHAN (1734-1803), évêque de Strasbourg - celui-là même qui sera impliqué plus tard dans l’affaire du collier- et le maréchal Louis de CONTADES (1704-1795), gouverneur militaire de l’Alsace. Les deux grands nobles sont fascinés par le personnage et s’en entichent totalement.

Parallèlement, CAGLIOSTRO qui prodigue ses soins gratuitement aux petites gens, acquiert très vite une grande réputation en ville. En 1781, il demande une patente pour exercer la médecine à Strasbourg, former des élèves, créer des maisons de santé et une pharmacie. Du coup, il s’attire les foudres des médecins du cru. Dès juillet, un mémoire imprimé du docteur OSTERTAG critique sa médecine. La Ville, qui a permis l’impression du document, doit se rétracter sous la pression du cardinal et du préteur royal, Conrad-Alexandre GERARD. Cela n’arrête pas la polémique : des affiches traitant CAGLIOSTRO de charlatan sont placardées la nuit dans la ville. L’arrivée à Strasbourg du nommé SACHY, une ancienne connaissance de CAGLIOSTRO, autre aventurier et maître chanteur de surcroît, achève de semer le désordre : le gêneur finit par être exilé à Kehl.

CAGLIOSTRO quitte finalement Strasbourg le 13 juin 1783 pour Naples, puis Bordeaux, Lyon et enfin Paris.

La demande du sieur MONROUX et la réponse de la Ville

Le document est daté du 16 mai 1781. MONROUX exerce la fonction d’avocat au parlement de Toulouse ce qui signifie qu’il est avocat à la cour de justice supérieure de la province du Languedoc (institution disparue en 1790) et appartient à la bourgeoisie de robe. Il loge rue de la Tour à Toulouse.

La réputation de guérisseur miraculeux de CAGLIOSTRO s’est répandue dans tout le royaume. Le sieur MONROUX écrit à la municipalité afin qu’elle transmette à CAGLIOSTRO (orthographié CALLIOSTRO) une demande de soins.

MONROUX commence par fustiger l’incompétence des médecins : il est « affligé depuis deux ans d’une infirmité que l’ignorance et la maladresse de nos chirurgiens m’ont assuré ». Il évoque le « bruit des merveilles » accomplies par CAGLIOSTRO et supplie les édiles de lui remettre son courrier.

La réponse de l’agent de la Ville, MATTHIEU, est extrêmement prudente. Soucieuse de ne pas s’attirer d’ennuis avec les protecteurs de CAGLIOSTRO, la Ville ne prend pas de position sur les talents de guérisseur du comte : « la réputation qu’il s’est acquise pour la guérison de toutes sortes de maladies étant une affaire d’opinion sur laquelle le public même est encore très partagé , le Magistrat se permettra bien moins de prononcer et de fixer par son avis la confiance que peuvent mériter les succès de M. le comte ». Par ailleurs, le représentant de la Ville souligne que le guérisseur ne répond généralement pas aux sollicitations qu’on lui adresse.

 

Archives municipales de Strasbourg, AA 2110.